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Nathalie Leenhardt

Un altruisme protestant




Ces dernières semaines se sont accumulés dans nos boîtes aux lettres les appels aux dons venus de quantité d’associations caritatives. La période de l’Avent puis celle des fêtes de fin d’année sont l’occasion pour elles de relancer leurs fidèles donateurs et, plus encore, d’en trouver de nouveaux. Les besoins vont croissant, parce que de nouvelles zones de pauvreté apparaissent, que ce soit à Beyrouth ou à Antananarivo ou, plus près de nous, dans nos villes et nos campagnes. De l’Armée du Salut à la Fondation Abbé Pierre, de l’Ordre de Malte à l’Arche, d’Enfance et Partage aux Petits Frères des Pauvres, de la Société nationale des Sauveteurs en mer à l’Institut Curie, de Handicap international à Médecins sans frontières, nous sommes sans arrêt sollicités.


Face à ces demandes justifiées, comment ne pas se sentir impuissants ou envahis? Nous voilà confrontés à de vastes questions : quelle cause choisir ? Pourquoi abandonner telle autre ? Devons-nous saupoudrer nos dons ou, au contraire, les centraliser ? Impossible de balayer ces interrogations d’un revers de la main, tant nous savons bien, en tant que citoyens et chrétiens, combien le monde associatif pallie les insuffisances de notre système social, contribue à la survie des plus pauvres parmi les pauvres et innove sans cesse face à de nouvelles précarités et catastrophes.


La générosité des chrétiens n’est pas un vain mot. Le sociologue Claude Dargent, chercheur au Cevipof, présentait début décembre une enquête sur les valeurs des Européens, lors d’une soirée organisée pour les 20 ans de la Fondation du protestantisme (1). Cette étude montre en effet que c’est même une priorité pour les croyants, qu’elle se traduise en euros ou en temps. Le bénévolat fait partie de leur vie, comme l’appartenance à une association humanitaire ou la préoccupation pour le sort des prochains. Selon les résultats de cette enquête, les protestants se montrent particulièrement engagés dans le milieu associatif. Qu’ils soient luthéro-réformés ou qu’ils se définissent comme évangéliques, ils sont surreprésentés dans l'appartenance à une association humanitaire ou caritative. Plus que les autres, ils se disent également concernés par le sort de l’humanité et témoignent d’une confiance en autrui plus large.


Des données qui faisaient dire à Claude Dargent qu’on pouvait parler « d’un altruisme protestant ». Dont acte.



La Réforme a définitivement transformé le sens du don. Avec elle s’achève l’utilisation par les catholiques de l’aumône dans une démarche de gagnant/gagnant. On ne donne plus pour obtenir son salut mais bien pour venir en aide à ses frères et sœurs démunis ou malades, au nom de l’Évangile. Ce geste ne met plus la lumière sur le donateur mais bien sur celui qui reçoit, dont les attentes sont ainsi valorisées dans un souci de justice.


La grâce ainsi offerte, chaque jour de la vie, invite à donner librement et joyeusement.


« Qu’as-tu que tu n’aies reçu ? »

interroge Paul, en Corinthiens.


Dans une société qui valorise l’individualisme et le cynisme, ces dons-là apportent un tout autre témoignage…


Nathalie Leenhardt


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